Parquet de Paris bloque les mandats d'arrêt dans l'affaire Ben Barka
Le Monde - Le parquet de Paris a demandé la suspension de la diffusion des quatre mandats d'arrêt visant des Marocains dans l'enquête sur la disparition de l'opposant marocain Mehdi Ben Barka en 1965 à Paris, a-t-on appris vendredi 2 octobre de source judiciaire.
Le parquet de Paris aurait pris cette décision "dans l'attente des précisions demandées au juge d'instruction". Selon cette source judiciaire, c'est Interpol qui a demandé des précisions afin de les rendre exécutables. "Sans ces précisions ces mandats sont inexécutables", a-t-on précisé. Ces quatre mandats d'arrêts internationaux émis par la France et visant notamment le commandant de la gendarmerie marocaine pour la disparition de l'opposant marocain ont été notifiés ces derniers jours par Interpol, après le feu vert du ministère de la justice.
Un revirement mystérieux
Les mandats d'arrêt avaient été signés initialement en octobre 2007 par un juge d'instruction de Paris. Ils avaient créé un premier incident diplomatique, le président Nicolas Sarkozy effectuant à cette date une visite officielle au Maroc. Non diffusés jusqu'ici, ils étaient restés virtuels. Pour une raison encore inconnue, ils avaient été transmis mi-septembre dernier par le ministère de la justice à l'intérieur, qui les avait remis ces derniers jours à Interpol, assurant en principe une diffusion internationale.
Me Maurice Buttin, avocat de la famille de Mehdi Ben Barka, avait dit voir dans ce revirement une possible conséquence du remplacement en juin, place Vendôme, de Rachida Dati par Michèle Alliot-Marie. L'avocat suggérait à la justice marocaine de faire entendre les quatre personnes visées, et il s'engageait en échange à demander la levée des mandats d'arrêt. "Plus ils tardent, plus cela démontre la responsabilité du Maroc et du roi Hassan II", a-t-il ajouté.
L'enquête ouverte depuis 1975 pour "assassinat", passée de juge en juge sans jamais être refermée, avait semblé proche d'aboutir après la mort de Hassan II en 1999, son fils et successeur, Mohamed VI, consentant à laisser venir les magistrats français au Maroc. Les juges avaient confirmé un scénario connu. Mehdi ben Barka a été enlevé et séquestré près de Paris par des truands français travaillant pour le Maroc, et actionnés par les services secrets du royaume chérifien.
Ces exécutants français se sont ensuite réfugiés au Maroc, où – l'anecdote est établie au dossier par des documents – ils ont obtenu la concession de maisons closes. Un d'entre eux est mort et les trois autres ont disparu en 1971. Selon certains témoignages, Mehdi Ben Barka aurait été torturé et tué, volontairement ou involontairement. Les responsables officiels marocains auraient ensuite fait disparaître son corps.
Rabat a bloqué la coopération à partir de 2003, refusant l'audition des quatre responsables aujourd'hui visés.
La dernière colonie d'Afrique
Depuis 1975, trois quarts du territoire du Sahara Occidental sont occupés par le Maroc. Une grande partie de la population originale vit encore dans des campements de réfugiés en Algérie. Ceux qui restaient dans leur pays originaire, sont subis aux violations graves des droits de l'homme, perpétrées par l'occupant marocain. Depuis plus de 40 ans les Sahraouis attendent l'exercice de leur droit légitime à l'autodétermination.
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