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Stop à la pêche UE au Sahara Occidental



Les Débats: Yahia Zoubir s’exprime sur le Sahara Occidental
"On n'a jamais invoqué le chapitre 7 de la Charte de l'ONU sur le Sahara Occidental", dit Yahia H. Zoubir, professeur en relations internationales et en management international à Euromed Marseille, école de management en France. Il a déjà enseigné aux Etats-Unis,  notamment à Washington et en Arizona. Il est auteur de plusieurs ouvrages et articles, publiés dans des revues spécialisées en Europe, aux USA et au Moyen-Orient.

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Les Débats

Semaine du 3 au 9 juin 2009

Entretien réalisé par Z’hor Chérief


Les Débats : En avril dernier, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté une résolution sur le Sahara occidental. Quelle lecture faites-vous de ce texte ?
Yahia H. Zoubir : La résolution 1871 est une prolongation du statut quo pour une autre année. Elle réitère ce qui avait été dit dans la résolution 1813 de 2008. Les mêmes contradictions ayant servi au blocage sont répétées. La dernière résolution parle du droit à l´autodétermination du peuple sahraoui, mais insiste sur une solution acceptable aux deux parties…donc chacune a un droit de veto. En même temps, elle félicite le Maroc pour les «efforts crédibles et sérieux» pour sa proposition d´autonomie et ne fait que prendre note de la proposition sahraouie, pourtant basée sur la légalité internationale. Ce qui est illogique dans cette résolution et les précédentes, c’est qu’on se félicite d´une proposition illégale du point de vue du droit international… Le Maroc n´a pas le droit de proposer quoi que ce soit aux Sahraouis, il n´a aucune souveraineté sur le territoire sahraoui.


Comment se fait-il que la France ait bloqué le dossier des droits de l’homme ?
La France, un des 5 membres au Conseil de Sécurité, a un droit de veto. Elle peut bloquer toute résolution qu´elle n’approuve pas. Ceci dit, il y a eu un semblant de compromis, puisque la résolution 1871 parle de l´importance de «réaliser des progrès concernant la dimension humaine».  


Vous avez déclaré récemment que l’évolution de la question sahraouie dépendra du couple franco-américain… ?
Oui, soit il y a alignement dans les positions des deux pays, soit les Etats-Unis décident, sous le leadership de Barack Obama, d´exécuter une politique qui serve uniquement leurs intérêts, sans tenir compte des intérêts français. La question est de savoir si le président Obama favorisera l´application du droit international ou s’il continuera à favoriser une politique fondée sur le réalisme politique, donc sur un soutien continu à la position marocaine.  


Pourquoi soutenez-vous alors que la solution au conflit se trouve dans l’application du chapitre 7 de la Charte de l’ONU. N’y a-t-il pas contradiction dans vos propos ?
Je serais le plus grand des naïfs en relations internationales, si je faisais une telle affirmation. Dans tous mes écrits… même dans mon dernier article (*) avec Hakim Darbouche, j´ai toujours précisé qu´on invoque le chapitre 7 dans certains conflits, par exemple la guerre faite à l’Irak en 1991 après son invasion du Koweït, alors qu’on ne l’a jamais invoqué concernant la question sahraouie. Les Etats-Unis et la France avaient fait des efforts considérables pendant les années 1970 pour que cela ne se produise pas. En 2003, on n’a même pas voulu imposer le plan Baker II, pourtant favorable au Maroc… Comment voulez-vous qu´on applique le chapitre 7 ? Cela relèverait de la chimère… Mais, la question du chercheur est de comprendre pourquoi le chapitre 7 est appliqué en Irak ou pourquoi un Etat indépendant est créé au Kosovo, alors qu’on dénie le droit des Sahraouis d´avoir leur propre Etat. D’ailleurs, je suis tout à fait d’accord avec le Pr Mohand Issad, lorsqu´il dit que le Sahara Occidental est déjà un Etat indépendant, étant donné que la puissance colonisatrice, l´Espagne, s´en est retirée. Evidemment, la question trouve sa réponse dans les enjeux géopolitiques et la baisse intensité du conflit sahraoui.


Les USA ne s’opposent pas à l’autodétermination des Sahraouis. Que gagnent-ils alors à soutenir le statu quo ?
De part leur histoire, les Etats-Unis ne sont pas opposés au principe du droit à l´autodétermination. A l’exception d’une parenthèse faite à la fin des années 1980, sous Bush/Baker, les administrations qui se sont succédées ont favorisé le statut quo. Cela montre le soutien des USA à leur allié marocain, sans pour autant gêner leurs relations avec l´Algérie. Tant que cet équilibre dans les relations avec les deux puissances régionales (Algérie et Maroc) est maintenu, le statut quo reste la meilleure politique. L´argument toujours avancé à Washington est que l’indépendance du Sahara déstabiliserait la monarchie et qu´une annexion du territoire par le Maroc, avec la bénédiction de l´ONU, aurait des effets graves dans la région et risquerait de provoquer une guerre entre l´Algérie et le Maroc.


A la mi-mai, vous avez révélé que des personnalités comme Madeleine Albright et David Welch, sont impliquées dans la rédaction du plan d’autonomie marocain. Sur quelles preuves vous appuyez-vous ?
Il y a confusion entre les choses. La première a un lien avec la question précédente… Certes, j’ai affirmé qu´un lobby informel, constitué de Madeleine Albright, le général Wesley Clarke, David Welch et des anciens officiels et académiciens proches du Maroc, tentent d´influencer la nouvelle administration US, en soutenant qu´il est de l´intérêt des USA et du Maghreb de régler le conflit du Sahara occidental par l’exécution du plan d´autonomie marocain, présenté comme la seule solution possible… Je vous invite à lire « Why the Maghreb matters : threats, opportunites and options for effective American engagement in North Africa », publié conjointement par le Potomac Institute for Policy Studies et le SAIS de l´Université Johns Hopkins. J´ai aussi dit que l´existence de lobbies ou leur constitution est une action légale et légitime aux Etats-Unis, et que donc les Sahraouis et les pays qui les soutiennent peuvent faire la même chose. Le système américain le permet. Mais, je n´ai pas dit que ces anciens officiels sont impliqués dans la rédaction du plan marocain d´autonomie… Pour l’autre remarque, je m’appuie sur ce que David Welch a lui-même déclaré devant le Congrès, le 6 juin 2007. Il a en effet affirmé que “we worked with them [Moroccans] on it [autonomy plan] », c’est-à-dire que “nous avons travaillé avec les Marocains sur le plan d´autonomie ». Cela relève donc du domaine public. Je dis donc et répète que c´est tout à l´honneur du Maroc d´avoir su construire des relations très étroites avec les USA et même avec la France. La monarchie marocaine a fait ce choix, il y a 2 siècles de cela…


En cas d’échec du 5è round des négociations, ne craignez-vous pas le retour à la guerre ?
Une reprise des armes, sur le plan du droit, est légitime. Mais, le Maghreb a besoin de développement et de stabilité. Une guerre pourrait avoir des conséquences fâcheuses. Déjà, on constate une course à l´armement dans la région. J´espère sincèrement que les pourparlers vont aboutir. Je pense que si les Etats-Unis soutiennent Christopher Ross dans sa mission, en tirant les leçons de l´échec de James Baker, et surtout en appliquant la partie de la résolution qui insiste sur des pourparlers sans conditions préalables, peut-être y aura-t-il une avancée.


Selon vous, quel rôle peut jouer l’Algérie aujourd’hui dans le règlement du conflit ?
La position de l´Algérie est consistante et respectable. Mais, répéter constamment qu´elle s´en tient à la légalité internationale, alors que le conflit est à sa porte, n’est pas une politique. Je pense que la meilleure perspective est de faire revivre l´UMA, qui est d´une importance capitale pour l´avenir de la région. Je pense qu´avec de la bonne volonté entre les dirigeants maghrébins, des scénarios peuvent être construits, qui permettraient de sortir de ce statut quo qui ne peut perdurer sans risque d´explosion et dont les conséquences ne favoriseraient certainement pas les peuples de la région.  




    

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La dernière colonie d'Afrique
Depuis 1975, trois quarts du territoire du Sahara Occidental sont occupés par le Maroc. Une grande partie de la population originale vit encore dans des campements de réfugiés en Algérie. Ceux qui restaient dans leur pays originaire, sont subis aux violations graves des droits de l'homme, perpétrées par l'occupant marocain. Depuis plus de 40 ans les Sahraouis attendent l'exercice de leur droit légitime à l'autodétermination.
Livre: Le droit international et la question du Sahara Occidental

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